Rue avec des noms de personnalités du Moyen-Age

Jude de Cresne             

L’une de nos rues les plus longues et les plus fréquentées est la « rue Jude de Cresne » qu’emprunte la départementale 48. Cette rue ne s’est pas toujours appelée ainsi. En 1830, sur le cadastre napoléonien, pour la portion de la rue qui part de la rue de la République et arrive au grand virage à gauche, elle se nommait la « rue des Graviers » comme le chemin qui la prolonge en droite ligne. L’autre partie, située entre cette rue des Graviers et la route de Chaumes actuelle (au niveau de la Marsange) s’est appelée au XVIIIème siècle la « rue de Châtres » et, en 1830, elle était déjà nommée « rue de Chaumes ». Le 26 mai 1898, le conseil municipal, désirant perpétuer le souvenir des bienfaiteurs de la commune, décide que, dans toute son étendue, cette rue porterait le nom de « Jude de Cresne ». Cette appellation nous vient du Moyen-Age.            

 La famille de Cresne a bien existé à cette époque : c’étaient des seigneurs, autre branche des seigneurs d’Ozouer, qui tiraient leur nom d’un domaine et « maison forte » autrefois situés entre Chaumes et Verneuil (1), et dont les noms apparaissent dans les textes de 1256 à 1306. Mais l’existence de Dame Jude de Cresne n’est avérée par aucun document authentique connu et seulement évoquée par un texte plus récent (1601) présenté pour un procès. Cependant son histoire a été reprise à la fois par une plaque commémorative apposée dans le chœur de notre église en 1865 (2) et par une plaquette de 1888. (3)             

Selon cette légende, le seigneur Philippe de Cresne est parti en Terre Sainte lors de la 3ème croisade (1189-1192) conduite par Philippe Auguste, roi de France, et Richard Cœur de Lion, roi d’Angleterre. Blessé et fait prisonnier à Acre, il est détenu dans un hôpital. Les Infidèles réclament une rançon à sa famille mais sa femme, Jude, n’a pas une fortune suffisante pour la rassembler et les habitants du village d’Ozouer l’aident à compléter la somme exigée. Malheureusement, Philippe décède avant ou lors de son retour. Néanmoins, Dame Jude de Cresne, sa veuve, lègue en 1206, par testament, 500 arpents de bois aux habitants d’Ozouer en signe de reconnaissance. En réalité, il n’y a aucune trace de ce testament, juste évoqué lors d’un procès en 1601 (4) où l’on en évoque une copie et d’un autre procès en 1741, au cours duquel les habitants d’Ozouer accusent les Célestins de Marcoussis de l’avoir détruit alors qu’ils le leur avaient confié en dépôt. (5)             

Ce qui est certain, c’est que les habitants d’Ozouer sont finalement devenus propriétaires des bois dont ils avaient déjà l’usage au début du XIIIème siècle (6) et ont pu le conserver tout au long des siècles jusqu’à nos jours (7). Les habitants, en assemblée, géraient eux-mêmes leurs bois et en édictaient l’usage. Mais ils ont dû les défendre âprement contre les revendications des Célestins de Marcoussis avec qui ils eurent de nombreux procès et la convoitise des seigneurs de Maurevert contre qui ils durent se battre par procès (1604) et avec des armes (1621). La commune possède toujours ces bois qui se situent entre la ligne de chemin de fer et la nationale 36 et en a toujours l’usage.                        

Elaboré et rédigé par l’association « Ozouer-le-Voulgis, mémoires et patrimoine » 

  1. « Une seigneurerie rurale de la Brie : Ozouer le Voulgis » de Philippe Savary
  2. Le maire était M.Fournier et le curé l’Abbé Drevault, passionné par le Moyen Âge
  3. « Chevaliers des croisades en Seine et Marne» de  E.Delaforge
  4. Ouvrage cité en (1)
  5. « Mémoire pour les syndics et habitans de la paroisse d’Ouzouer le Voulgis demandeurs contre les Célestins de Marcoussy » Maître George de La Roche, avocat.
  6. Ces bois sont nommés au fil du temps « bois des Usaiges » ou « bois des Usages » et même « bois des Usselles ». 
  7. C’est pourquoi les habitants d’Ozouer ont encore aujourd’hui droit à l’affouage dans les bois communaux.


Rue de Chaumes (actuelle rue Jude de Cresne)


Jean de Montaigu

La « rue Jean de Montaigu » est une rue récemment tracée et nommée, créée lors de la construction du lotissement Nexity, en bas de l’avenue de la Gare. Elle doit ce nom à un personnage du Moyen- Age qui tint un rôle rapide mais important dans l’histoire du village car c’est lui qui imposa à Ozouer-le-Voulgis les Célestins de Marcoussis comme seigneurs pour 4 siècles.             

Jean de Montaigu est né à Paris vers 1363. Son destin atypique et tragique a suscité de nombreux écrits. (1) Jeune encore, il devient secrétaire puis conseiller du roi Charles V car il est fort apprécié et décrit comme une personne aimable, charitable et intelligente. Il appartient au collège des notaires et secrétaires du roi, institution très liée à l’ordre religieux des Célestins. Quand le roi meurt, son fils n’a que 13 ans et une régence de ses oncles s’instaure. Jean de Montaigu et d’autres notables assurent un gouvernement, appelé par dérision les « Marmousets » (2). Pendant son adolescence, Charles VI se lie d’amitié avec Montaigu qui lui sert de tuteur et l’accompagne lors de campagnes risquées. Quand il a le pouvoir, le jeune roi le nomme trésorier, chambellan, et « souverain maître d’hôtel du Roi » et le gratifie de nombreuses largesses. Mais Charles VI est atteint de crises de folie et Montaigu, qui lui est attaché, fait alors vœu d’établir un monastère pour obtenir sa santé mentale. Et, pour certains historiens, sa devise obscure « ILPADELT » ferait référence à cette préoccupation : Je LAi Promis A Dieu Et Le Tiendrai.             

En 1390, Jean de Montaigu épouse Jacqueline de la Grange, fille d’Etienne de la Grange , premier président du Parlement, et ils auront plusieurs enfants. Avec les revenus de ses charges et les nombreuses gratifications exceptionnelles du roi, il accumule une immense fortune. Il acquiert 4 hôtels particuliers à Paris et de nombreuses œuvres d’art dont il est amateur. Il fait don à Notre-Dame de Paris d’une deuxième cloche pour son bourdon, qui sera prénommée Jacqueline comme sa femme.             

Il fait édifier à Marcoussis un somptueux château et fait construire dans son parc un monastère où il souhaite installer des religieux, selon son vœu. Pour préparer cette opération, il achète le 6 mars 1406 à Gontier Col, conseiller du roi, pour 6200 écus d’or, les biens que ce dernier possédait à Ozouër-le-Voulgis et à Retal. Ensuite, le 21 mai 1406, «Jean de Montaigu et Jacqueline de la Grange fondent dans leur domaine de Marcoussis un monastère dédié à la Sainte Trinité. Pour pourvoir à l’entretien du prieur et des 12 religieux qu’ils veulent y établir, ils dotent cette fondation de 600 livres parisis de rente assignées sur les domaines récemment acquis dont 280 livres de rente pour Ozouër, Garigny et Retal » (3) .Ce qui fait des Célestins de Marcoussis les nouveaux seigneurs d’Ozouër-le-Voulgis et de Garigny jusqu’en 1789.             

Après l’assassinat du duc d’Orléans, Montaigu, qui est du parti orléaniste, essaie de négocier avec le duc de Bourgogne, Jean-sans- peur, qui le déteste car il est le dernier obstacle à sa prise de pouvoir. La haine du duc de Bourgogne trouve aisément le grief principal pour condamner Montaigu : celui-ci exhibe ses biens et organise des fêtes somptueuses alors que les finances royales sont au plus bas. Le 7 octobre 1409, sur l’ordre de Jean-sans-peur, Montaigu est arrêté, emprisonné au Châtelet et torturé. Après un procès sommaire et sur des chefs d’accusation très flous, il est condamné et décapité le 17 octobre 1409 et son corps est suspendu au gibet de Montfaucon pendant 3 ans.  Tous ses biens sont confisqués et redistribués à des personnalités avides qui gravitent autour du roi. Son fils obtiendra sa réhabilitation et le fera enterrer au monastère de Marcoussis en 1412.             

Les Célestins de Marcoussis, en 1410, manquent de perdre leurs biens donnés par Jean de Montaigu considérés comme dépendant de sa succession. C’est en distribuant des richesses, cachées par leur bienfaiteur, qu’ils obtiennent que leur couvent et dépendances ne soient pas compris dans les biens saisis. On peut conjecturer que ceux d’Ozouer en font partie.            


 Elaboré et rédigé par l’association « Ozouer-le-Voulgis, mémoires et patrimoine »                 

(1)  www.vieux-marcoussis                     

(2) un marmouset, en sculpture, désigne un petit personnage grotesque et grimaçant                 

(3)«Une seigneurerie rurale de la Brie : Ozouër-le-Voulgis » de Philippe Savary




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